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Source : Bulletin SHAP, tome XLIX (1924) pp. 160-163.

LE  PRIEURÉ DE LA DAURADE A PÉRIGUEUX

Parmi les divers prieurés dépendant de l'abbaye de Cadouin, on cite généralement Sainte-Marie-la-Daurade, à Périgueux.

Où se trouvait cette église, dont le nom (la Vierge Dorée nous rappelle un antique et célèbre prieuré toulousain ? On s'accorde généralement pour la situer, avec Wlgrin de Taillefer, à l'est et à deux ou trois cents pas de la Fontaine des Malades, dans la paroisse Saint-Georges[1]. Un acte analysé par Lespine la confronte au chemin qui va de la Fontaine de Saint-Georges, vers le grand chemin allant du Pont des Menudes à Vergt, du côté de l'orient et au chemin public du pont des Menudes vers Saint-Georges[2]. Le recours aux titres de fondation de ce prieuré, en 1207, précisera définitivement son emplacement sur la rive gauche de l'Isle, prés du pont de Périgueux, le long de la chaussée de Saint-Jacques. Cette dernière indication est du plus haut intérêt puisqu'elle permet d'identifier cette route avec le grand chemin de Vergt, et confirme la situation de Périgueux comme étape des pèlerins de Galice[3], déjà connue par le livre des pèlerins de Compostelle.

Sainte-Marie-la-Daurade fut d'abord une construction particulière, élevée par un bourgeois du Puy-Saint-Front, Hélie de Charroux, dont la famille alliait la piété à la bienfaisance, ainsi qu'en témoigne le souvenir d'un vieil hôpital de Périgueux qui portait ce nom.

En 1207 (n. st.), Hélie de Charroux fit donation de cette chapelle entre les mains de Raymond de Châteauneuf, évêque de Périgueux, pour et en faveur des moines de Cadouin. Dès le 15 février 1207, ceux-ci pourvurent aux besoins de cette église et des frères qui y étaient établis par l'octroi d'un certain nombre de biens-fonds et de rentes en nature, entre autres le quart de la dîme de la pêcherie de Bigaroque, sept pièces de laine, cinquante fromages de vache, etc.[4]

Il est difficile de suivre jusqu'à sa disparition, dont la date nous échappe, l'histoire du prieuré de la Daurade. En 1320-1321, lors du brûlement en masse des lépreux, il servit de lieu d'internement à quelques-uns des malheureux Mesels [5]. Il paraît par la suite avoir servi de léproserie[6]. La chapelle existait encore à la fin du XIVe siècle[7].

Géraud LAVERGNE.

I

1207. — Donation par Raymond de Châteauneuf, évêque de Périgueux (1197-1210) à Pierre, abbé de Cadouin, et à l'abbaye de Cadouin, de l'église Sainte-Marie-la-Daurade, près Périgueux.

(Orig. aux Archives de Cadouin jadis copié par Leydet. Bibl. nat., fonds Périgord, t. XXXVII, f° 68).

R., Petragoricensis epicopus karissimo filio in Christo Petro, abbati Caduniensi, et successoribus suis, sibi canonice substituendis, salutem et omnimodam pacem. Cum, ex injuncto nobis officio, loca religiosa et Deo dicata diligere et confovere teneamur, illos potissimum debemus diligere et beneficia conferre, quos morum honestate et religionis fervore vidimus. Ea propter, fili Petre, nos, considerata tua honestate, et domus Caduniensis religione, et honesto servitio; quod assidue Deo et sue genitrici ibidem impenditur, tibi et successoribus tuis ecclesiam beate Marie de Deaurata, que est prope pontem Petragorarum, juxta stratam que ducit versus Sanctum Jacobum, habendam concedimus. Ut autem hec nostra donatio firma tibi et successoribus tuis perduret, presens inde scriptum fieri et sigillo nostro com- , muniri precepimus. Affuerunt autem huic nostre donationi G. de Costa, R. de Malmusso[8], A. Bertrandi, monachi de Cadunio ; Iterius de Cumbis, Petrus Laurentii, sacerdotes ; Petrus de Graulet, noster notarius : Helias de Karrofio, dicte ecclesie fundator : Garinus, canonicus Sancti Aviti[9]; G. Landric, P. Bernardi, R. Dau, burgenses de Petragoris. Facta autem fuit hec nostra donatio anno ab Incarnatione Domini M° CC° VI°, [Innocentio] III Romano pontifice, .Philippo in Francia regnante, episcopatus nostri anno X°.

II

1207, 13 février. —-Notification par l'évêque de Périgueux et l'abbé de Cadouin, de la donation faite par Hélie de Charroux, bourgeois du Puy-Saint-Front, à l'abbaye de Cadouin, de l'église Sainte-Marie-La-Daurade, à laquelle l'abbaye assigne un certain nombre de droits, immeubles et rentes pour l'entretien des moines desservant le prieuré.

(Orig. aux Archives de Cadouin, jadis copié par Leydet. Bibl. nat., fonds Périgord, t. XXXVII, f° 67).

R., Dei gratia Petragoricensis episcopus et frater P., Caduniensis ecclesie dictus abbas, omnibus ad quos presentes littere pervenerint, salutem et pacem omnimodam. Testimonio litterarum nostrarum, tam presentibus quam futuris, notum fieri volumus quod Helias de Carrophio, burgensis de Podio Sancti Frontonis, dedit Deo et beate Marie virgini de Cadunio,et monachis et fratribus ibidem Deo servientibus, sub regula Sancti Benedicti et ordinis Cisterciensis, ecclesiam Sancte Marie Deaurate, cum omnibus pertinentes suis, que est sita in riparia Elle fluminis, prope pontem Petragorarum, quam ipse dictus Helias de Carrophio suis sumptibus edificaverat, et hanc donationem fecit ad honorem Dei et beate virginis Marie, pro salute anime sue, et patris et matris, et omnium parentum suorum. Facta siquidem hac donatione in manu et presentia nostra, fratres de Cadunio, considerata-et inspecta tenuitate loci et novitate ecclesie supradicte, consilio et assensu nostro, et totius Caduniensis capituli, dederunt et concesserunt eidem ecclesie Sancte Marie Deaurate, et fratribus ibidem servientibus, perpetuo habendum et possidendum quidquid juris vel possessionis habebant vel habituri erant apud Petragoras vel circa, et domum de Chauda Valelha[10], cum omnibus pertinentiis suis ; et grangiam de Lussoleiras[11], cum pertinentiis suis ;et duo sextaria frumenti in parrochia Sancti Amandi[12], et quartam partem decime piscium, quam habent in piscatura de Bigaroca[13], scilicet de salmos et de colacs [14] et de lempreas et d'anguilas, et VII pezas de lana, ad pensum quo ipsi vendunt lanas suas, et quinquaginta caseos vachiers, quorum XXV festo beati Joannis Baptiste, cum jamdictis VII pezas de lana, et alii XXV in nativitate beate virginis Marie, singulis annis persolventur ; et X sextaria siliginis et V sextaria frumenti apud Brajairiacum[15], ad mensuram qua venditur et emitur in eodem Castro. De grangia que vocatur Artilonga[16], vel de riparia apud Cadunium, que jamdicta XV supra dicte domui et fratribus ibidem servientibus in festo Sancti Michaelis singulis annis persolventur ; et corrigiam terre, que est in riparia de Gavirac[17], quam R. de Manhenac et Geraldus, et Petrus, fratres ipsius Raymundi, dederunt Deo et beate Marie de Cadunio, et monachis et fratribus, ibidem Deo servientibus in perpe-tuum, et omnia illa immobilia que domus de Cadunio acquirere poterit usque ad castrum de Limolio[18] et usque ad ecclesiam de Cbampsagret[19], que est inter Brageyriacum et civitatem Petragoricensem, exceptis mobilibus Helie Monsinis, que proprie abbatie de Cadunio collate fuerunt pro Dei amore, et exceptis conventualibus abbatiis, si forte prioratus Sancte Marie Deaurate non fuerit abbatia. Factum fuit hoc anno ab Incârnatione Domini M° CC° VI°, indictione Xa, nonas februarii, luna IIIIa, Innocentio Romano pontifice, Philippo regnante in Gallia.



[1] Ou de Saint-Hippolyte. Antiquités de Vésone, t. II, p. 591.

[2] Notes dans le Bull. de la Soc. hist. et arch. du Périgord, t. II (1875), p. 271. Le pont en question est le Pont dit de la Pierre, de Sainte-Claire ou de Saint-Jacques, aujourd'hui ruiné, devant les abattoirs.

[3] Cf. Dufourcet (J.-E)., Les voies romaines et les chemins de Saint-Jacques dans l'ancienne Novempopulanie, dans le Congrès archéol. de France, LVe session (1889) p. 240-264. De Périgueux partaient les routes de pèlerinage La Réole-Ostabat ; Agen-Auch Gavarnie. De Gourgues n’a pas relevé cette particularité dans son Dictionnaire topographique de la Dordogne, V° Chemin de Saint-Jacques.

[4] Lespine dans les Notes citées plus haut, p. 272, se trompe sur les dates des deux actes que nous reproduisons, en attribuant à Raoul de Lastours (1210) ce qui appartient à Raymond de Châteauneuf (1207).

[5] Villepelet.(R.), Histoire de la ville de Périgueux, p. 78.

[6] Arch. mun. de Périgueux, CC 43 : « payé 40 s. à un frère du couvent de la Daurade pour rente assignée aux lépreux ».

[7] Arch. mun. de Périgueux, GG 177, où il est question de la chapelle Nostra Dompna de la Daurada, près du moulin de Cachepouil.

[8] Malmusson, hameau, comm. du Bugue.

[9] Saint-Avit-Sénieur, comm., canton de Beaumont.

[10] Caudeville, comm. de Douville, cant. de Villamblard

[11] Lissouleix, ham., comm. de Saint-Laurent-des-Bâtons.

[12] Saint-Amand, comm. du cant. de Belvès ou de Vergt.

[13] Bigaroque, comm. de Coux-et-Bigaroque, cant. de Saint-Cyprien.

[14] Sorte de poisson. Cf. Ducange, v° colacus.

[15] Bergerac, chef lieu d'arr.

[16] Artiguelongue. Cf. De Gourgues, Dict: top. de la ordogne, p. G.

[17] Comm. de Gardonne, cant. de Sigoulès (De Gourgues).

[18] Limeuil, comm., cant. de Sainte-Alvère.

[19] Campsegret, comm., cant. de Villamblard.

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